Laurent OOT formation

Produire ou consommer des savoirs

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Produire ou consommer des savoirs
03 Avr 2024

Produire ou consommer des savoirs

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Il est parfois difficile de se faire une idée globale et juste de la particularité d'une pédagogie sociale, comme la Pédagogie Freinet. On réduit souvent cette référence à un groupe d'outils disparates et déliés entre eux. Certains ont entendu parler du "texte libre", du "tâtonnement expérimental", du "Conseil", du "plan de travail", de la correspondance ou de la coopération. Mais qu'est ce qui réunit tout celà?

Pire encore, la notion de Pédagogie Freinet est toujours teintée de contexte scolaire. On peine à imaginer les apports de cette pédagogie en dehors de l'Institution scolaire. Cela tient évidemment aux bases mêmes de l'oeuvre des Freinet, où est omniprésente la référence à l’École, car ils avaient le projet de la transformer.

Cette vision de la P.F. est dommageable; dommageable en premier lieu les concepts d’École et de Classe , chez les Freinet... étaient "anti-scolaires"! A chaque fois que dans leurs écrits et travaux , les Freinet évoquaient "la classe" ou "l’École", c'était pour proposer des techniques ou des actions qui visaient justement à déscolariser l'institution scolaire.

En second lieu, cette vision "scolaro-centrée" de la Pédagogie Freinet est dommageable car l'évolution de l'institution scolaire, depuis les années 80, est contraire au projet  de ces pédagogues. l’École, en France, penche toujours plus vers sa caricature. Elle limite ses apports aux savoirs fondamentaux selon un mode de transmission descendant et frontal. Elle abandonne peu à peu toute véritable ambition éducative pour se consacrer à la sanction de l'acquisition des savoirs et compétences. Forcément en difficulté  car elle ne répond pas aux nombreux besoins éducatifs des enfants et des jeunes, elle se tourne toujours plus vers des pratiques autoritaires, de contrôle et  de sanctions. Les inégalités sociales, culturelles sont non seulement reproduites, mais encore augmentées via des pratiques discriminantes en fonction des milieux sociaux. Pire, elle évolue récemment vers un modèle d'apartheid scolaire de moins en moins masqué...

C'est donc en dehors de l’École , que la véritable inspiration de la Pédagogie Freinet trouve aujourd'hui à s'employer et à se déployer. Depuis des Centres sociaux, des Espaces de vie sociale,  des associations créées par des innovateurs sociaux, elle inspire les pratiques en dehors des murs de l’École, et qui se déroulent directement dans les milieux de vie des enfants et jeunes, sur leur propre territoire. Car c'est dans ces espaces déconsidérés que peut se développer avec suffisamment de liberté une pédagogie qui rencontre les aspirations des enfants et familles touchées par toutes les insécurités: sociales, économiques, culturelles, sanitaires, administratives et politiques.

De plus en plus d'enfants , d'adolescents, de jeunes de milieu populaire, n'accèdent plus aujourd'hui à une scolarité digne de ce nom et qui les respecte.  De plus en plus d'entre eux, connaissent actuellement une déscolarisation précoce,  ou des parcours scolaires faits de ruptures et de déceptions.

Que retenir alors des outils , lentement accumulés par le Mouvement Freinet , dans un contexte "hors institution", pour tous ces jeunes?

Je pense que dans ce nouveau contexte, c'est l'essence même du message de la Pédagogie Freinet qui reste valide et qui permettra d'adapter les outils et techniques qui y sont liés.

Derrière l'apparente complexité de la Pédagogie Freinet, le postulat de base, celui qui permet toutes les initiatives pédagogiques reste simple et inchangé.  Il n'y a rien à gagner à concevoir les savoirs, la connaissance , les apprentissages comme une "matière" à assimiler, à "consommer". Et surtout à ce jeu là les enfants de milieu populaire sont et seront par définition les grands perdants.

On ne peut pas acquérir valablement des savoirs, des connaissances , des compétences , quand on est issu de milieu précarisé,  depuis une position passive, de récepteur; parce que ce n'est pas notre culture.

Il faut aux enfants, aux jeunes et même aux adultes, de milieu populaire  une autre position : celle de la production de savoirs.

C'est en effet en produisant des savoirs qu'on les maîtrise vraiment; le but réel d'une éducation émancipatrice est donc d'apprendre en produisant individuellement les savoirs, les habiletés , les techniques  nécessaires au groupe. La Pédagogie Freinet rejoint ici la pédagogie "Freire" (du nom du pédagogue latino-américain, Paulo Freire)

" Les aigles ne prennent pas l'escalier" aimait  répéter Célestin Freinet, amateur d'expressions imagées.  On épuise et on décourage la jeunesse populaire à l'astreindre à un travail,  un programme par degrés qui n'a pas d'autre but que d'éliminer progressivement la cohorte entière.

Il faut viser dès le départ la création, la production, la position d'ingéniérie de ses propres apprentissages. C'est la seule manière de sortir de la prolétarisation.

Former les équipes, les acteurs sociaux d'aujourd'hui, quel que soit leur statut, suppose donc d'apprendre à traduire cet objectif dans le contexte et le territoire de chacun, en tenant compte des obstacles et contraintes souvent en provenance des institutions.

Il est possible d'inventer ensemble la formation vers de nouvelles formes d'actions éducatives, sociales, culturelles, sanitaires, conformes à cette ambition.

Chiche?

 

 

 

 

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